Lorsqu’une entreprise se lance dans un processus de recrutement à l’international, certaines préoccupations naissent inévitablement, surtout lorsque c’est une première fois. Afin de pouvoir vous aiguiller dans la prise de décisions judicieuses, voici une liste de questions que vous devrez absolument vous poser.
1 — Dans quel pays dois-je recruter ?
Si vous trouvez très sympathique un de vos amis brésiliens, ou la jeune Philippine qui s’occupe de votre mère à la maison de retraite, cela ne signifie pas que les ressortissants de leur pays d’origine constituent un infaillible vivier pour votre structure. Dans les faits, le choix du pays ou de la zone géographique va être déterminé d’une part en fonction de la culture et des valeurs de votre entreprise, afin de favoriser l’intégration (et la rétention) des travailleurs, et d’autre part sur les compétences et expertises recherchées, tout autant que certains attributs cognitifs ou physiques que les postes peuvent exiger selon le type et la charge de l’emploi.
Il est important de ne pas vous laisser influencer dans le choix d’une zone de prospection de personnel. Si vous faites affaire avec une agence, assurez vous que celle-ci est capable de vous apporter des solutions géographiques qui prennent compte de vos besoins techniques, mais qui sachent aussi accorder l’ADN de votre entreprise à celui de futurs employés qui seront motivés à l’idée de s’installer dans votre région.
2 — Qui dois-je recruter ?
Naturellement, vous chercherez à recruter une personne qui possède les compétences adéquates, et qui saura bien s’intégrer dans vos équipes de travail. Mais cette personne devra également posséder un profil compatible avec les critères d’immigration. En effet, le profilage de vos candidats doit s’adapter non seulement aux besoins du permis de travail, mais aussi à long terme, pour les besoins de la résidence permanente.
Souvent, les procédures d’immigration ne sont considérées qu’une fois le volet du recrutement terminé. Or, dans les faits, c’est l’élément déterminant qui va concrétiser un recrutement positif. Se poser la question des procédures d’immigration après la sélection des candidats confirmés, c’est trop tard.
Et enfin, oubliez les coups de cœur ! Ce sont les pires des recrutements en mission. S’il faut apprécier les candidats selon leur profil professionnel et leur personnalité, il faut se méfier du sentiment de « coup de cœur » : en cas de problème, la déception est difficile à digérer.
3 — Quel budget dois-je prévoir ?
Le coût d’un recrutement doit être évalué par candidat. Il est ventilé selon les différentes étapes du processus.
En premier lieu, il y a les coûts associés au recrutement, qui interviennent dans la sélection des candidats. Des mesures sont mises en place par le gouvernement du Québec pour aider les entreprises, autant lors des missions organisées par les organismes appuyés par le MIFI que lors de missions de recrutement privées. Dans ce dernier cas, les coûts peuvent varier du simple au double, voire au triple. Si vous passez par une agence, assurez-vous qu’elle soit inscrite sur la liste des agences en recrutement international auprès de la CNESST, et sachez que la gratuité n’existe pas. Aucune agence ne peut recruter gratuitement si aucune subvention n’est versée, car en aucun cas un candidat ne peut être chargé pour obtenir un poste dans votre entreprise.
Ensuite, un autre coût important est celui des procédures d’immigration. Les frais gouvernementaux peuvent facilement atteindre 1 800 $ CAN par candidat pour le premier permis de travail. Les honoraires des professionnels, en général pour les procédures d’immigration, sont compris dans les honoraires de l’agence de recrutement. Sinon, il faudra les défrayer en sus au notaire, consultant, ou avocat en immigration. Soyez attentif dans le choix des services et la stratégie à long terme. Une simple erreur peut avoir des conséquences en cascade et faire repartir votre candidat.
Et enfin, il y a lieu de préparer un budget pour l’accueil et l’intégration. Ces frais couvrent le voyage, le déménagement, les assurances, l’accompagnement de l’accueil, mais aussi les traductions des documents. Il faut prendre en compte également les cours de soutien en complément à la francisation si besoin est, et bien évidemment la préparation à l’intégration interculturelle et la gestion de la diversité en milieu de travail qui se fait avec des professionnels. Vous pourrez avoir certains supports de la part des organismes subventionnés par le MIFI qui sont mandatés. Toutefois, certaines entreprises décident de gérer toute la logistique d’accueil en interne, avec l’aide de professionnels. Si votre agence de recrutement vous l’offre, ce sera un net avantage, car elle pourra dès lors synchroniser les différentes étapes du processus de sélection, d’immigration, et jusqu’à l’intégration de vos employés dans leur nouveau milieu de vie.
Souvent, les montants peuvent faire peur aux employeurs.
Savez-vous que le coût additionnel engendré par ces frais de recrutement ne représente sur le taux horaire du poste qu’un montant variant de 1,50 $ CAN à 2,50 $ CAN ? D’où la dernière question à se poser au sujet du budget. Que préfère-t-on : laisser les postes de travail vacants ou les voir tourner et assurer la croissance de votre entreprise ?
4 — Quelles sont mes responsabilités en tant qu’employeur envers les travailleurs étrangers temporaires ?
Du point de vue de l’immigration, certaines responsabilités incombent aux employeurs si le poste est émis sous un permis de travail avec EIMT/CAQ dans le volet des « bas salaires ». En effet, vous devrez vous assurer de prendre en charge les billets d’avion pour faire venir vos travailleurs, mais aussi pour les faire repartir, aider votre employé à trouver un logement convenable (cela ne sous-entend pas que vous devrez payer le loyer), couvrir les 3 premiers mois de carence de la RAMQ par une assurance privée. Sinon, pour toutes les autres catégories de permis de travail, la prise en charge du voyage est à votre discrétion, selon la politique interne de votre entreprise. Mais vous devrez, employeurs, respecter obligatoirement les règles des normes du travail et/ou de la convention collective.
Vos employés travailleurs étrangers temporaires doivent bénéficier des mêmes conditions de travail et des mêmes avantages que vos autres employés. Autant Service Canada qu’IRCC effectuent des vérifications de conformité pour s’assurer que ces droits sont respectés. À ce sujet, si vous passez par une agence de recrutement, celle-ci a pour obligation de transmettre à tous les travailleurs qu’elle a recrutés une fiche d’information sur les conditions d’emploi au Québec, et de les informer de leurs droits. Quoiqu’il en soit, pour rappel, dès qu’un employeur recrute un travailleur étranger temporaire, dans le cadre ou pas d’une mission, vous devez le déclarer auprès de la CNESST.
Il ne faut pas oublier non plus le côté humain, car en tant qu’employeur, vous avez un rôle important à jouer à cette étape. Vous recrutez des êtres humains, qui vont s’investir dans votre entreprise et le tissu social et économique du Québec. Vous êtes celui qui tend la main pour les accueillir, mais vous devrez vous assurer de pouvoir refermer vos bras autour d’eux afin qu’ils se sentent en confiance. N’oubliez pas que les différences culturelles entre vous et vos travailleurs peuvent être aux antipodes. Par conséquent, il est important de ne jamais négliger la mise en place des solutions et moyens d’accueil et d’intégration.
5 — Comment gérer les délais du processus et quand mes employés pourront-ils commencer à travailler ?
S’il y a une règle à respecter, c’est de ne pas retarder le processus de sélection et enclencher votre mission de recrutement le plus tôt possible. Une présélection, suivie d’une sélection, demandent plusieurs semaines de travail, particulièrement depuis la COVID-19, qui a rendu les candidats plus craintifs au changement.
Ensuite, les procédures d’immigration s’organisent en deux étapes. Il faut compter de 3 mois à 8 mois selon le pays, le type de permis, etc. Encore une fois, vous comprenez que la détermination de la zone géographique peut avoir un impact sur les procédures en termes de délai de traitement. Ce point confirme l’importance des procédures d’immigration, qui doivent obligatoirement être orchestrées dès le début de la mission de recrutement, mais aussi pendant tout le processus de présélection, de façon individuelle à chaque candidat pour éviter les erreurs de profilage.
Une bonne communication avec votre agence vous permettra de recevoir un échéancier de suivi des opérations, et d’être informé à chaque étape du processus. Cette information est d’autant plus importante lorsque votre production est affectée par ce recrutement, et que vous comptez sur cette ressource précieuse dans un délai déterminé. Il faut toutefois être averti que les délais de traitement auprès des ministères sont très variables, et qu’il est préférable de pouvoir compter sur un plan alternatif, le cas échéant.
En bref, les points essentiels à déterminer pour vous lancer dans le processus de recrutement international consistent à :
- Fixer une ou plusieurs période(s) sur l’échéancier de production pour projeter l’arrivée des travailleurs. Si ces périodes sont dans un avenir proche, vous allez devoir envisager une solution alternative.
- Déterminer les postes à pourvoir et le nombre de candidats à recruter. Vous pouvez même anticiper sur un recrutement en 2 ou 3 vagues. Il est important de réviser attentivement la description de postes pour bien correspondre aux critères d’évaluation en matière d’immigration.
- Définir sa culture d’entreprise et identifier les pays ou zones géographiques que vous savez ou pensez proches de votre culture. Ne vous laissez pas influencer par les campagnes de « séduction », mais discutez avec d’autres entreprises qui ont recruté dans ces zones et vécu l’expérience.
- Bien que l’aspect financier soit déterminant, il ne doit pas être votre élément éliminatoire. Le recrutement international a un coût, mais vous serez gagnant si vous pouvez compter sur la qualité de la sélection, et que toute la logistique de l’immigration, de l’accueil et de l’intégration est synchronisée — et vous libère donc de tous les tracas et surprises de dernière minute.
- Mettre en place un projet de gestion qui comprend :
- L’échéancier général ;
- La sélection du partenaire, avec qui vous devrez avoir une relation de confiance à chaque étape du processus ;
- La présélection et la sélection des candidats, incluant les tests d’aptitude et/ou pratiques ;
- Les procédures d’immigration ;
- La préparation de vos travailleurs étrangers temporaires ;
- La préparation de vos équipes de travail, ainsi que la révision/adaptation de la politique interne d’accueil et de gestion de la diversité ;
- L’organisation de la structure d’accueil des arrivées ;
- La logistique et le suivi de l’installation de vos travailleurs étrangers temporaires, et éventuellement de leur famille, dans le nouvel environnement de vie.
Êtes-vous prêt ? La question ne se pose même plus ! Maintenant, c’est définitivement oui !