Alors que son vingtième hiver québécois arrive à grands pas, Maria-Cristina Herran revient avec nous sur son parcours et sur son expertise en ressources humaines dans un secteur bouleversé par la pandémie : la santé publique.
Maria-Cristina Herran a une formation universitaire de deuxième cycle en droit et un emploi dans la fonction publique en Colombie lorsqu’elle découvre la ville de Québec. Ce qui devait être un séjour temporaire, dont le but était d’aider sa mère et son frère à s’installer dans leur nouveau pays, deviendra le choix d’une vie.
Aujourd’hui conseillère en gestion de ressources humaines à l’Institut national de la santé publique du Québec (INSPQ), Mme Herran peut faire de son expérience un levier afin de sensibiliser les gestionnaires aux enjeux particuliers des travailleurs issus de l’immigration.
Faire de l’expérience une opportunité
Après être passée par l’étape de francisation, Maria-Cristina Herran reprend des études en administration des affaires. En parallèle, elle fait un stage à la ville de Québec et tente de développer son réseau. « Je savais déjà que c’était très important pour se faire connaître, pour savoir comment se passe le marché de l’emploi », se souvient-elle.
En 2006, alors qu’elle n’est pas encore diplômée, une entreprise pionnière dans le recrutement de travailleurs issus de l’immigration l’embauche comme coordonnatrice du programme d’intégration. « Ça m’a créé un penchant pour les ressources humaines », affirme Mme Herran, dont le goût pour le recrutement, la formation et l’accompagnement de gestionnaires, notamment dans l’intégration des travailleurs issus de l’immigration, la suivra jusqu’à son poste actuel.
Spécificités du secteur public québécois
« Le secteur public est fortement convoité par nous, les immigrants », affirme Mme Herran, qui explique que « dans certains pays, quand on parle d’un emploi stable et de sécurité, c’est avec le secteur public ».
Si le secteur public québécois offre aussi certains avantages pour ses travailleurs, il présente aussi « ses propres spécificités et ses propres contraintes », souligne Mme Herran, avec lesquelles il est impératif de se familiariser, selon elle.
Un travailleur de la santé publique doit, par exemple, comprendre le rôle des ordres professionnels, différencier ce qui relève directement du ministère de la Santé et des Services sociaux des compétences propres aux organismes parapublics.
La conseillère en gestion de ressources humaines explique également que les processus d’embauche ne relèvent pas forcément du service qui recrute, mais peut être généralisé, une pratique qui peut déstabiliser certains demandeurs qui viennent d’arriver au pays et qui ne sont pas familiers avec le fonctionnement du secteur public au Québec.
L’INSPQ, par exemple, détient le statut d’organisme parapublic et « dispose d’un processus de recrutement indépendant à celui qu’on peut connaître dans les ministères », souligne Maria-Cristina Herran.
Un dialogue essentiel
L’effort d’adaptation doit aussi se faire à l’interne, croit Mme Herran, qui juge « important de déployer des efforts de communication envers ses employés nouvellement arrivés ou [qui en sont à leur] première expérience de travail au Québec ». Elle estime que les gestionnaires doivent être en mesure d’informer leurs équipes sur les habitudes de la compagnie, tout autant que sur « quoi faire ou prévoir un jour de tempête ».
« [Il ne faut] pas oublier [d’] impliquer les équipes sur place afin que les futurs employés se sentent bien accueillis par ses supérieurs, mais également par ses pairs », conseille-t-elle, suggérant la pratique du parrainage.
Un comité égalité, diversité et inclusion (EDI) a été mis sur pieds en janvier 2022 et « devra proposer et mettre en œuvre un plan d’action afin de contribuer à faire de l’Institut [national de la santé publique] un milieu qui promeut et soutient la diversité, l’inclusion et l’accès équitable à l’emploi, dans le respect de ses obligations morales et légales » comme la Loi sur l’accès à l’égalité en emploi, explique Maria-Cristina Herran. En 2021, les personnes considérées comme appartenant aux minorités visibles constituaient 12 % des membres de l’Institut national de la santé publique.
Si elle a un conseil a donné aux gestionnaires, c’est de « s’assurer de créer un environnement de travail sain et rassurant afin de contrer les préjugés qui peuvent exister ou apparaître, et, finalement maintenir un dialogue constant avec ses nouveaux employés ». Un dialogue auquel Maria-Cristina Herran continuera sans doute de contribuer.