Le nombre d’étudiants internationaux inscrits dans les universités québécoises a doublé en dix ans, selon les chiffres du ministère de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur. Est-ce une bonne nouvelle pour les entreprises, dans la province qui enregistrait le taux de chômage le plus bas au Canada en 2021 ? Surtout, comment faire pour attirer les étudiants venus de l’étranger et les intégrer au marché du travail ?
« Comme dans plusieurs autres secteurs [les entreprises œuvrant dans la métallurgie] étaient contrainte de refuser des contrats, à augmenter les quarts de travail », se souvient Véronique Bolduc. En cause, la pénurie de main-d’œuvre, explique la directrice adjointe du service Formation professionnelle, emploi et aides économiques (FPEAE) au Centre de services scolaire de la Beauce-Etchemin.
Si le déficit de travailleurs ne se conjugue pas qu’au passé, Mme Bolduc et son équipe semblent fiers du chemin parcouru : le programme Privilèges-Entreprises, anciennement « Viens te souder au Québec », a permis de former plus de cent cinquante étudiants étrangers depuis 2013, en collaboration avec une dizaine d’entreprises de la région.
Une campagne de séduction
À l’image des 48 000 étudiants étrangers qui gonflaient les rangs des universités québécoises en 2019-2020, ceux d’entre eux qui ont fait le choix de la région n’y sont pas atterris par hasard. Avec Privilèges-Entreprises, des stratégies sont mises en place pour inciter les participants à choisir de s’y installer : des missions de recrutement sont réalisées en partenariat avec des institutions et associations à l’international, des webinaires sont organisés pour faire la promotion de la qualité de vie en Beauce, répondre aux interrogations des étudiants et les accompagner dans leurs démarches migratoires. Le programme offre également des stages rémunérés en entreprises dans des conditions avantageuses, ce qui permet notamment d’attirer de jeunes familles.
La compensation financière permet « une stabilité qui sert l’intégration », d’après Mme Bolduc, pour qui « l’expérience en entreprise facilite aussi l’intégration sur le marché du travail ». Suite à leur parcours académique, les participants qui remplissent les conditions liées à l’expérience de travail peuvent d’ailleurs appliquer au Programme de l’expérience québécoise (PEQ), et poursuivre leur projet de vie au Québec.
Favoriser la rétention
« Il y a un très bas taux de chômage, ce qui fait que, quel que soit le domaine d’étude dans lequel ils vont aller, ils vont trouver du travail à la fin », soutient Sylvie Bisou, conseillère en attraction et rétention des étudiants internationaux chez Québec International.
Pour attirer des étudiants étrangers dans les régions de la Capitale-Nationale et de Chaudière-Appalaches, l’agence de développement économique mise entre autres sur les opportunités postdiplômes et organise des « activités d’employabilités », comme le Programme Immersion Pro, qui offre des visites en entreprise durant les semaines de relâche, ou encore le Championnat des emplois, une journée récréative entre étudiants internationaux et représentants d’entreprises, qui se termine par des entretiens d’embauche.
Québec International encourage également les étudiants à profiter des 20 heures de travail hebdomadaire comprises dans leur permis d’études pour cumuler de l’expérience professionnelle. L’emploi étudiant est « un vrai moyen d’intégration sociale », souligne d’ailleurs Mme Bisou, qui souhaite sensibiliser les entreprises, qui « pensent que les démarches sont très compliquées pour embaucher les étudiants étrangers, alors que cela est comparable à l’embauche d’un Québécois ».
Tournés vers l’avenir
Que ce soit pour combler les cohortes déficitaires ou répondre aux besoins de main-d’œuvre du marché du travail, les étudiants internationaux sont un atout pour le Québec, soutient Mme Bisou.
Comme pour les travailleurs étrangers, elle croit que « les cours de langue en amont seraient vraiment bénéfiques » pour faciliter l’intégration des étudiants venant de l’étranger. Mme Bisou rappelle également que « la complexité et la longueur des démarches d’immigration [est] un frein pour les étudiants qui, aujourd’hui, aimeraient rester ».
Pour Véronique Bolduc, l’attraction et la rétention des étudiants étrangers doivent aussi passer par la mobilisation des entreprises auprès des acteurs de l’éducation. Si celles-ci font déjà appel aux travailleurs temporaires, « avoir des étudiants qualifiés [et formés au Québec] permet une meilleure intégration professionnelle et sociale », affirme-t-elle.