
Qu’ont à nous apprendre les acteurs de l’immigration francophone au Canada ? Immigrant Québec est allé à leur rencontre. Après l’Ontario et le Nouveau-Brunswick, direction la Saskatchewan, pour le dernier épisode de cette minisérie.
Chaque année, la Saskatchewan perd des locuteurs francophones, d’après un rapport de Statistique Canada paru à la mi-juillet 2023.
Les données du recensement de 2021 fixent à 16 850 le nombre d’habitants dont la première langue officielle apprise est le français. Cela représente environ 1,5 % de la population provinciale.
Qu’en est-il des néo-Fransaskois ? Quel rôle peut jouer l’immigration francophone dans le renversement de cette tendance démographique ?
Les néo-Fransaskois
« Une des choses dont les immigrants bénéficient quand ils viennent chez nous, c’est qu’ils ont des francophones qui peuvent les aider à naviguer dans leur intégration socioéconomique », assure Siriki Diabagate, du Conseil économique et coopératif de la Saskatchewan (CÉCS).
Fondé en 1947, l’organisme de développement économique a, avec le temps, intégré l’importance de l’immigration dans le dynamisme du français et sa vitalité sur le marché du travail. À raison : toujours selon le recensement de 2021, 3,3 % des immigrants récents et 4,3 % des immigrants dits établis et résidents en Saskatchewan pouvaient soutenir une conversation en français.
Et lorsque les francophones viennent à manquer, le CÉCS « peut aider les employeurs à aller trouver la main-d’œuvre dans les pays francophones », soutient le gestionnaire du volet employabilité et immigration, à les accompagner dans leurs démarches d’établissement et d’intégration.
Mais la province a, selon lui, bien plus que du travail à offrir. Aux grands centres urbains comme Montréal ou Toronto, il oppose « les avantages » de la ruralité qu’a à offrir la Saskatchewan. « On se connaît tous ici, c’est facile d’entrer en contact avec le réseau francophone », explique Siriki Diabagate.
Multiplier les possibles
Pour mener à bien l’opération séduction, Siriki Diabagate et son équipe ne font pas les choses à moitié.
Parmi les services offerts par le CÉCS, un soutien à l’intégration économique prévoit de l’accompagnement pour les nouveaux arrivants francophones dans la réalisation d’un curriculum vitae adapté au marché saskatchewanais et dans la préparation d’entretiens d’embauche. Des ateliers sur la culture et le monde du travail canadien sont également disponibles, ainsi que la mise en contact avec de potentiels employeurs.
Un autre programme est destiné aux immigrants francophones de 15 à 30 ans, et prévoit trois semaines de formations, rémunérées grâce à une subvention salariale. Les femmes de minorités visibles, francophones et anglophones, peuvent également bénéficier d’un programme similaire, qui prévoit une formation de six semaines. Elles sont également admissibles à de l’aide financière au développement d’entreprise.
Siriki Diabagate précise que de nombreux emplois en français sont disponibles, dans des secteurs aussi variés que le milieu associatif, celui de l’éducation, dans la fonction publique, les musées et bien d’autres. « Il faut juste savoir frapper à la bonne porte », dit-il.
Un secret bien gardé
« Dans le monde du travail, le réseautage joue un rôle très important. Quand on est nouvel arrivant […], on n’a pas le réseau, on ne connaît pas comment ce monde-là fonctionne comparé à chez nous », poursuit le gestionnaire.
Le programme Connecteur « permet aux immigrants de s’établir, et de pouvoir utiliser ce réseau-là pour intégrer leur domaine d’activité », en les mettant en contact avec des professionnels canadiens.
En ce qui concerne l’isolement que peuvent craindre certains nouveaux arrivants du fait de la prédominance de l’anglais dans la province, Siriki Diabagate suggère de « ne pas s’arrêter à la barrière de la langue ». S’il est vrai que l’accès à l’emploi peut être conditionnel à la maîtrise de la langue de la majorité, il affirme néanmoins qu’« en général les gens se débrouillent bien, parce que quand on met les pieds ici on est en immersion anglaise automatiquement ».
Une immersion qui s’opère aussi dans la réalité de la diversité saskatchewanaise. « Le secret le mieux gardé au Canada », selon lui, « parce qu’on n’en entend pas beaucoup parler. Mais quand on la visite, on est toujours fasciné par la simplicité des choses ».
Photo : Ruvim Kerimov