Compagnons et de vie et partenaires d’affaires depuis plus de vingt ans, Valérie Wypiorcyk-Ory et Fabrice Roth partagent aussi le même goût pour la transmission et l’entraide. Ils ont accepté de nous raconter leur parcours migratoire et entrepreneurial atypique, dans l’espoir que les apprentissages qu’ils en ont tirés pourront bénéficier à d’autres.
C’est un jour comme les autres que la vie de la famille Roth va basculer. « Est-ce qu’on ne changerait pas cde vie? », se demandent Valérie et Fabrice, la quarantaine, parents de trois enfants et propriétaires d’un bar et d’un bureau de tabac à Jarny, une petite commune de Lorraine, en France.
En 2016, après quatre ans et de nombreuses démarches administratives qui les mènent à l’obtention de la résidence permanente, Fabrice, Valérie et leurs enfants s’installent dans la ville de Québec.
Une histoire d’immigration… et de transmission
« Le talon d’Achille d’un immigrant, c’est ses enfants », affirme Valérie, qui n’a jamais quitté sa France natale avant de s’installer au Canada, un pays où elle sait pouvoir offrir une bonne éducation à ses enfants, mais aussi leur donner le goût de connaître une autre culture et le goût d’aller vers le monde. « C’était à nous de leur montrer le chemin », dit-elle, fièrement.
Le chemin, Valérie et Fabrice souhaitent le montrer à d’autres. Le couple collabore notamment avec l’agence de développement économique Québec International et a partagé son expérience lors du Sommet 2021 de l’immigration au Québec afin de raconter leur histoire – et inspirer les personnes qui souhaitent s’installer au Québec.
Tout en organisant la vente de leur patrimoine immobilier à Jarny, le couple prépare le terrain pour leur arrivée dans la Capitale-Nationale. « On a fait des repérages avant de venir avec la famille. Une première fois pour choisir la ville, puis repérer l’école, trouver un appartement, se faire une idée des différents quartiers et s’imprégner ! », se souvient Valérie.
La patience : ingrédient de la réussite
Peu de temps après leur arrivée, elle trouve un emploi auprès d’une banque, tandis que Fabrice devient commis dans une quincaillerie. « Avant de nous lancer en affaires, Valérie et moi avons préféré avoir une expérience en tant qu’employés avant pour apprendre à connaître le monde du travail ici », explique Fabrice, qui attribue notamment le succès de leur franchise du restaurant La Piazzetta à leur grande attention aux différences entre les cultures française et québécoise au travail.
Après plus de deux ans d’emplois salariés, leur réseau les encourage à retrouver leur chapeau d’entrepreneurs. « C’est le réseautage qui nous a permis de reprendre le restaurant », explique Valérie, qui souligne également l’importance, pour les entrepreneurs issus de l’immigration, de réaliser un bilan financier avant toute chose – et de « bien se renseigner sur le secteur d’activité dans lequel il[s] v[ont] travailler », ajoute Fabrice.
Et il parle d’expérience : « le métier de la restauration en France n’est pas du tout le même que le métier de la restauration ici », affirme-t-il, citant par exemple le fait que les cuisiniers québécois sont moins rémunérés que les serveurs, une situation inverse dans son pays d’origine.
Entraide
D’après leur expérience, un immigrant français qui arrivent au Québec avec un certain capital, qui fait appel à un évaluateur financier, un avocat et parvient à s’entourer des bons organismes, comme Québec International dans la région de la Capitale-Nationale, ne devrait pas rencontrer trop de difficultés pour lancer son entreprise. Valérie ajoute qu’il est même « beaucoup plus facile de reprendre une entreprise au Québec qu’en France », où les démarches administratives sont plus lourdes, et où l’accompagnement et la coordination entre les différents acteurs impliqués dans le processus sont moins étoffés.
Pour autant, les moments de découragement sont difficiles à éviter, spécialement pour les nouveaux arrivants. C’est là où, selon eux, les employeurs peuvent jouer un rôle clé avec leurs salariés issus de l’immigration : « il faut faire le point avec l’employé, le rassurer », encourage Valérie, pour qui être employeuse implique une grande part de transmission.
« On leur partage tous nos bons coups, notre réseautage, on partage notre comptable… En fait, on les prépare complètement à leur intégration », admet celle qui embauchait, au moment d’écrire ces lignes, deux travailleurs immigrants français.
Futurs citoyens canadiens, Valérie, Fabrice et leurs enfants n’envisagent pas, pour l’instant, de retour définitif en France.