Les candidats à l’immigration au Canada sont des cibles de choix pour les arnaqueurs en tous genres. Et avec les besoins en main-d’œuvre actuels et la popularité du recrutement international, les entreprises québécoises ne sont pas à l’abri de certains pièges, elles non plus.
Depuis que le gouvernement du Québec a annoncé son intention de favoriser l’accueil de personnes immigrantes francophones, à commencer par les entrepreneurs et travailleurs autonomes, les réseaux regorgent d’annonces proposant une aide dans les démarches pour obtenir un visa. Contre rémunération, bien sûr.
Or, les réseaux étant aussi des espaces d’échange et d’entraide entre candidats à l’immigration et nouveaux arrivants, les arnaques, bien que pointées du doigt, sont parfois difficiles à identifier. Nous avons rencontré un expert, afin de comprendre comment les reconnaître, et quoi faire pour les éviter.
Comment identifier les pièges ?
Les arnaques et les fraudes peuvent avoir lieu par courriel, par téléphone, ou encore par l’entremise d’un site web ou d’un fil de contenus sur un réseau social. Elles peuvent par exemple prendre la forme d’une proposition d’aide dans les démarches pour immigrer, la promesse d’un emploi une fois sur place, ou encore un forfait « clé en main » : visa, billet d’avion, hébergement et avenir de rêve au Canada.
D’après Steven Johnston, conseiller réglementé en immigration, ces arnaques concernent surtout les candidats à l’immigration, et sont principalement orchestrées depuis l’extérieur du Canada.
En parallèle, il souligne une hausse des cas, au cours des deux dernières années, visant aussi les entreprises qui cherchent à recruter des talents à l’international. En ce qui concerne les employeurs, il précise que « parfois [les arnaqueurs] ne sont pas mal intentionnés, c’est juste beaucoup d’ignorance ».
Employeurs et recruteurs, soyez alertes
À en croire M. Johnston, les entreprises seraient principalement lésées par l’incompétence ou l’inexpérience de leurs interlocuteurs.
Un premier cas de figure est celui où « un employeur va parler à un employé immigrant “qui connaît beaucoup de gens qui veulent venir”. Alors l’employeur va donner un budget à l’employé pour faire venir ces gens-là », décrit-il. « L’employé pense que parce que cette personne est passée à travers le système, il est capable de le faire pour ces amis aussi », explique M Johnston, qui invalide cette pensée populaire.
Dans d’autres situations, ce sont les entreprises qui se disent spécialisées dans le recrutement international elles-mêmes qui peuvent mener les entreprises à perdre d’importantes sommes d’argent, sans les résultats escomptés. Un phénomène que Steven Johnston explique par le fait qu’il s’agit d’un domaine très en demande, dans lequel il est peu dispendieux de se lancer en affaires. « Quelqu’un qui a un ordinateur et un accès à internet peut commencer à faire du recrutement à l’international », affirme-t-il, mais seules l’expérience et la compétence peuvent garantir les résultats.
L’expérience et la compétence : deux qualités que ne garantit pas forcément le permis de la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST) requis pour exercer, croit M. Johnston.
De vrais fraudeurs opèrent, eux, sans permis, ou encore sous l’identité volée de conseillers réglementés en immigration, ou d’autres représentants légalement habilités à exercer par les autorités.
Bien s’informer
Pour éviter la fraude, il faut d’abord s’assurer que les agents avec qui vous faites affaire détiennent le Permis d’agence de recrutement de travailleurs étrangers temporaires, émis par la CNESST, ainsi que le Permis de pratiquer le droit en immigration, émis quant à lui par le Collège des Consultants en Immigration du Canada (CCIC) — ou, alternativement, un permis de pratiquer le droit émis par le Barreau du Québec, selon le cas. Les numéros d’identification affichés sur leurs sites web peuvent être vérifiés dans les registres officiels correspondants.
Et pour éviter l’incompétence ou l’inexpérience, Steven Johnston conseille de consulter LinkedIn, afin de juger par soi-même si le conseiller ou l’entreprise de recrutement correspond à ses attentes.
D’autre part, il rappelle qu’« ici, lorsque les employeurs sont lésés, c’est vraiment parce que ce sont des gens qui débutent une activité de recrutement international » et manquent d’expérience. « Les arnaques organisées visent beaucoup plus les travailleurs étrangers, et c’est souvent d’autres étrangers qui vont les piéger ».
Les candidats, des proies de choix
Du point de vue des personnes immigrantes, les arnaques peuvent avoir des conséquences plus larges qu’une seule perte directe d’argent : vols d’identité, fraudes ou encore virus informatiques pour en citer quelques-unes. Pour les candidats à l’immigration, plusieurs méthodes permettent de les identifier, et donc de les éviter.
Avant de payer pour un service, vérifier si celui-ci est vous est facturé de façon réaliste et légitime. Par exemple, un professionnel n’a pas le droit de charger pour le Certificat d’acceptation du Québec (CAQ). Pour un permis de travail régulier, si des frais de plus de 3 500 $ CAN sont réclamés, « ça ressemble à une arnaque », d’après M Johnston. Comme pour les entreprises, il suggère de vérifier si l’avocat ou le conseiller qui a le dossier en main est bien enregistré dans l’ordre professionnel ou le registre correspondant.
Afin de vous assurer que vous êtes bien en contact avec des professionnels homologués, voici des éléments à prendre en considération :
- Les frais qui vous sont réclamés en devises locales seront toujours fixés d’après les taux de change officiels ;
- On ne vous demandera jamais de régler les frais de service dans un compte en banque personnel ou en passant par un service de transfert de fonds privé ;
- Les employés ne communiqueront jamais avec vous à partir d’une adresse courriel gratuite (hotmail.com, gmail.com, yahoo.com, etc.) ;
- Vos informations personnelles ne vous seront jamais demandées par courriel. Si c’est le cas, méfiez-vous !
Si vous ou l’un de vos employés pensez être victime d’une arnaque, vous pouvez contacter le Centre antifraude du Canada ou le service de police local.
Et pour les éviter du mieux possible, Steven Johnston conseille de « magasin[er] un peu plus, et [d’]interroge[r] plusieurs personnes qui ont déjà fait affaire avec des professionnels spécialisés en immigration ».