Nous vous emmenons à la découverte de l’emploi en région. Chaque article de cette série sera consacré à une région ou à l’un de ses secteurs phares. Notre première étape s’arrête en Outaouais, une région qui prospère dans l’ombre d’Ottawa, marquée par le bilinguisme.
Aux frontières de l’Ontario, la région de l’Outaouais est une région vaste et « très multiculturelle », explique Roxana Merello, directrice générale du SITO, le Service Intégration Travail Outaouais.
Basé à Gatineau, cet organisme est l’intermédiaire local entre les nouveaux arrivants et les entreprises. « Nous nous chargeons plus spécifiquement du volet intégration. D’autres partenaires s’occupent de l’établissement en tant que tel », précise Mme Merello.
Avec la sortie de crise qui s’amorce, la pénurie de main-d’œuvre s’est intensifiée en Outaouais, comme dans la majeure partie du Québec. « Depuis le mois d’avril, de plus en plus d’employeurs font appel à nous. Aujourd’hui, on a le même niveau de travail qu’avant la pandémie », explique-t-elle.
Portrait de l’emploi en Outaouais
Malgré un bassin important de 1 000 travailleurs, l’équipe du SITO ne parvient pas à répondre à la demande des employeurs. « Chaque année, on gère 600 résidents permanents installés à Gatineau, les autres sont des nouveaux arrivants vivant à Montréal qui veulent déménager », détaille Mme Merello.
En Outaouais, c’est dans les régions plus reculées que la pénurie se fait plus ressentir, là où le logement et le transport sont plus rares. Quant aux secteurs les plus touchés, ce sont surtout les secteurs de la foresterie, de la santé et de l’enseignement — sans oublier celui de l’informatique, dans lequel de grands projets se développent localement.
Depuis quelques mois, l’équipe redouble d’efforts pour recruter des profils plus spécialisés à Montréal, faute de les avoir sur le territoire outaouais.
Seulement, elle pointe du doigt que les personnes voulant déménager de Montréal pour la région demandent des salaires minimums bien supérieurs à ceux qui sont habituellement pratiqués par les entreprises locales, pour des fonctions semblables. Pour contourner cet écueil et répondre à leurs besoins, de plus en plus d’employeurs explorent le recrutement à l’international. Roxana Merello les met cependant en garde : « Certains pensent que c’est simple, mais c’est toute une préparation pour l’équipe comme pour la personne immigrante. Tout est nouveau pour lui, il ne connait rien au Québec ! », rit-elle en incitant les employeurs à faire appel au SITO pour mieux réussir leur recrutement.
La proximité avec Ottawa
« Mais le principal problème de notre région provient du bilinguisme, car on est à côté d’Ottawa », explique-t-elle. En Outaouais, peu d’employeurs demandent de parler seulement français, surtout dans l’administration. C’est notamment le cas dans la région de Pontiac, aux portes de l’Ontario, qui est très anglophone. Environ 14 % de la population est anglophone dans la région, et 61 % sont bilingues, selon le recensement de 2016. Au Québec, le taux médian de personnes anglophones est de 7,5 %. « Pour amener des personnes immigrantes, c’est compliqué », regrette Mme Merello.
Hormis les caractéristiques linguistiques, la proximité avec Ottawa crée une compétition féroce pour les employeurs de l’Outaouais. À Ottawa, les travailleurs sont payés davantage, le gouvernement fédéral est un important employeur, et nombreux sont ceux qui vivent en Outaouais, mais travaillent à Ottawa. « C’est positif d’être à côté de la capitale fédérale, car c’est stratégique et attirant, mais on perd aussi beaucoup de main-d’œuvre à son profit », explique Roxana Merello.
Comme de nombreuses autres régions du Québec, l’Outaouais souffre d’un manque de logements locatifs. « Cela prendrait des actions plus concrètes, car cela n’avance pas vite. Il y a aussi du travail de sensibilisation à faire sur les propriétaires », avance-t-elle.
Se faire aider pour intégrer ses travailleurs immigrants
C’est ainsi que le SITO encourage les employeurs à se faire accompagner avant même de commencer à faire appel à de la main-d’œuvre immigrante. « Il y a des choses à régler avant l’arrivée du travailleur », insiste-t-elle.
« Avant, certains employeurs envoyaient seulement leur offre d’emploi. Maintenant, on leur demande de venir rencontrer nos conseillers pour définir toutes les caractéristiques de l’emploi », explique Mme Merello. Un moyen de rendre l’offre d’emploi plus concrète pour le nouvel arrivant. « Ça crée de meilleures correspondances ! Les recruteurs que l’on a aidés voient la différence dans l’intégration du travailleur ! », assure-t-elle.
Parmi les pratiques qui fonctionnent, elle mentionne quelques idées qui ont porté leurs fruits, comme celle d’offrir le déménagement, le transport ou le logement pour aider ses travailleurs à s’installer.
Enfin, pour attirer davantage de travailleurs immigrants, Roxana Merello estime qu’améliorer la concertation et la collaboration entre les acteurs de l’immigration serait plus que bénéfique. « On pourrait se présenter comme une région plus forte face à Montréal », estime la directrice.