Conçus pour les femmes qui souhaitent tailler leur place dans le milieu de la construction, les services offerts par les Elles de la Construction ciblent aussi les travailleuses arrivées au Québec dans le but de bâtir une nouvelle vie.
Au départ, des femmes de métier, professionnelles et entrepreneuses de la construction ont formé un regroupement privé afin de « briser l’isolement », raconte Josée Dufour, présidente d’Axiomatech Inc., ainsi que du Conseil d’administration des Elles de la Construction.
Près d’une décennie plus tard, le réseau œuvre comme organisme sans but lucratif, toujours avec la mission de « favoriser et promouvoir la condition des femmes dans l’industrie, » résume la présidente.
Centré sur le réseautage, l’entraide, la formation et la représentation des travailleuses de la construction, les activités et les programmes offerts par les Elles de la Construction sont divers : du concours « Elles reconnaissent » aux semaines thématiques, en passant par le plaidoyer, « ce qu’on veut, ultimement, c’est transformer la culture de l’industrie et faire de l’inclusion une norme au Québec », affirme Mme Dufour.
Féminin pluriel
Si le milieu de la construction est historiquement très masculin, ne comptant que 3,27 % de travailleuses en 2021, c’est principalement en raison de préjugés, explique Mme Dufour.
Pas assez de force physique, de compétences… Mme Dufour elle-même relate avoir subi des discriminations. « Si j’arrive sur un chantier avec mon surintendant, par exemple, tout le monde va automatiquement s’adresser à lui ».
Selon Mme Dufour, il est évident que lorsqu’on ajoute à cela le paramètre « immigrante », les préjugés se multiplient. Et, de fait, « l’intégration est plus difficile encore ».
Accompagnement
Les Elles de la Construction prennent en compte les femmes issues de l’immigration. Un service de mentorat permet aux nouvelles arrivantes de bénéficier de l’expérience de travailleuses qui connaissent déjà le milieu québécois, et qui peuvent les guider et les accompagner tout en soudant des liens.
Le programme d’Accompagnement vers un emploi, mis sur pied en collaboration avec le Secrétariat à la condition féminine, se décline en trois ateliers. Les participantes sont d’abord invitées, si nécessaire, à apprendre les bases de la recherche d’emploi au Québec. Les ateliers de co-développement et de placement en emploi permettent ensuite d’en apprendre plus sur les codes propres aux différents domaines de la construction, histoire de faciliter l’intégration en emploi.
Josée Dufour souligne d’ailleurs que les spécificités de la Régie du bâtiment du Québec et de ses codes, notamment en sécurité, représentent un apprentissage nécessaire pour les travailleuses, quel que soit leur degré d’expérience avant d’arriver ici.
Travailler en équipe
Les efforts d’intégration doivent être partagés par l’employeur. D’après Mme Dufour, ils commencent d’ailleurs dès le processus d’embauche.
« Quand on regarde un CV, on regarde des compétences », raison pour laquelle Mme Dufour et son équipe analysent les candidatures anonymement. « On retire une partie du biais », qu’il soit sexiste ou raciste, poursuit-elle.
À l’inverse des « bonnes pratiques » mises de l’avant dans les formations en employabilité, explique Mme Dufour, elle croit qu’il est important que l’employeur pose des questions à sa main-d’œuvre immigrante sur ses origines. Si le fait de ramener un employé à sa condition « d’étranger » peut être considéré comme préjudiciable, elle croit aussi que « ça peut être fait par intérêt et non par moyen de discrimination envers l’autre ».
Elle encourage les employeurs à « trouver des points communs avec cette personne-là », mais aussi à créer du lien au sein de l’équipe en organisant, par exemple, des soirées autour de la culture culinaire ou artistique de chacun.
Finalement, Josée Dufour encourage les chefs d’équipe à « aller chercher eux-mêmes les outils pour mieux intégrer leur main-d’œuvre ».
Dans le milieu de la construction au Québec, être femme et immigrante est un stigma qu’il reste à déconstruire.