Bien qu’inévitables, les biais inconscients et leurs impacts peuvent être contrebalancés par la mise en place de bonnes pratiques en ressources humaines.
Dans le contexte de la rareté de main-d’œuvre, Brigitte Lavallée, conseillère en ressources humaines agréée (CRHA), coach professionnelle et directrice d’Aventuranza Communication, rappelle que modifier ses pratiques en ressources humaines prend du temps, et que « quand on agit dans l’urgence, on n’a pas le temps de mettre les bonnes pierres pour de bonnes fondations ».
L’expérience candidat
Les fondations pour une bonne relation de travail débutent dès l’embauche, selon Mme Lavallée, et l’expérience candidat commence avec la rédaction de l’offre d’emploi. Elle soutient par exemple qu’une femme va postuler si elle croit avoir 100 % des compétences énoncées dans la description de poste, tandis qu’un homme va déposer sa candidature à partir de 70 %. « On peut supposer que c’est la même chose pour les groupes minoritaires », dit-elle, et le recruteur devrait donc en tenir compte dans la manière dont sont formulées les compétences requises.
« Lorsqu’on veut aller chercher des talents diversifiés, il faut aussi diversifier les endroits où on va faire nos affichages », suggère Mme Lavallée, qui propose notamment de se tourner vers les organismes communautaires spécialisés dans l’employabilité de personnes issues de l’immigration.
Elle rappelle également que les entrevues peuvent être sujettes à de nombreuses mauvaises interprétations. Les différences culturelles peuvent modifier certaines pratiques, comme le fait de serrer la main ou de ne pas regarder dans les yeux, et même la manière de répondre aux questions.
« Si les gens qui passent les entrevues ne sont pas formés pour comprendre ces possibles barrières-là, on va évaluer [le candidat issu de l’immigration] comme on évalue n’importe qui d’autre », croit Mme Lavallée, rappelant que les personnes appartenant à des groupes minoritaires ou marginalisés peuvent, en plus, arriver en entrevue avec un élément de stress additionnel.
Un travail de longue haleine
Une pensée populaire laisse entendre que les personnes immigrantes sont tellement reconnaissantes d’avoir un emploi qu’elles ne vont jamais partir. « Ce n’est pas vrai du tout », dément la CRHA. « On a des personnes immigrantes au Québec qui sont extrêmement compétentes, qui ont des diplômes […] et une expérience de travail qui a énormément de valeur, donc non, ils ne vont pas se contenter d’un petit boulot. Ils veulent qu’on les voie et qu’on utilise leur compétence à leur juste valeur et selon leurs aspirations ».
Pour s’assurer que les biais inconscients affectent le moins possible l’expérience employée des travailleurs issus de l’immigration, la formation ne fait pas tout, d’après Brigitte Lavallée. « Il y a beaucoup d’éléments de communications qu’il faut amener au sein de l’équipe déjà existante », affirme-t-elle, mais il faut aussi « s’assurer que la haute direction est onboard, qu’elle comprend bien l’importance de poser un ensemble de gestes pour faire ne sorte que […] ces gens-là n’aient pas une expérience employée médiocre et veulent quitter ».
Elle encourage également à revoir les mécaniques de promotion, d’avancement, ou encore à qui sont offertes les formations pour qu’ils continuent de se développer. Particulièrement dans le cas de la régionalisation, elle invite à préparer les équipes à accueillir leurs collègues, les aider à comprendre « toute la diversité qu’il y a dans la diversité », grâce à des ateliers, des vidéos, ou en les conviant à participer à des activités de socialisation.
« Il y a des avantages à la diversité, mais si on ne crée pas un environnement qui est sain, qui est inclusif, on va avoir beaucoup d’enjeux plutôt que des avantages », met en garde Mme Lavallée, qui rappelle que si « on a tous des biais inconscients, c’est ce qu’on fait avec qui fait la différence ».
De bonnes pratiques à mettre en place
- Faire en sorte que la haute direction soit investie dans la modification des pratiques en ressources humaines et de l’axe stratégique
- Créer des espaces de communication entre les gestionnaires et l’équipe, mais aussi au sein de l’équipe
- Adopter une politique claire en matière d’équité, de diversité et d’inclusion (EDI), prenant en compte l’expérience candidat tout autant que l’expérience employé
- Revoir ses pratiques en ressources humaines et oser diversifier son approche
- S’assurer que les lieux physiques comme virtuels sont sécuritaires, au sens propre comme sur le plan psychologique
- Mettre en place un indicateur afin de mesurer l’avancement de sa transformation organisationnelle. « Ça peut nous aider si on est dans la bonne voie ! »
Partie 1/2 – Biais inconscients, comment les reconnaître
Photo : Marcus Urbenz