
Régulièrement sujets à changements, les programmes en immigration sont un casse-tête pour les praticiens des ressources humaines, amenés à renouveler sans cesse leurs pratiques pour accompagner les travailleurs étrangers temporaires au sein de leurs équipes.
Les changements de ces derniers mois qui ont touché le Programme des travailleurs étrangers temporaires (PTET) et les conditions d’accès à la résidence permanente ont de quoi déstabiliser les professionnels les plus aguerris. En première ligne, les praticiens des ressources humaines n’ont d’autre choix que d’adapter leurs pratiques pour faciliter le renouvellement des permis de travail et accompagner les travailleurs étrangers temporaires (TET) dans leur projet d’immigration.
Quand vient le temps de s’adapter à l’instabilité des politiques d’immigration « il n’y a pas de formule magique », admet Audrey Anne Chouinard, avocate et associée fondatrice chez Galileo Partners. Pour autant, un ensemble de pratiques à mettre en place en amont peut aider à s’y retrouver.
Conseils pratiques
« Le meilleur remède à l’incertitude, c’est la préparation », affirme d’emblée Me Chouinard, à qui l’expérience dans l’accompagnement d’entreprises a permis d’identifier quelques bonnes pratiques à adopter.
D’entrée de jeu, elle invite les praticiens à établir un système d’organisation, par exemple sur un fichier Excel, dans lequel centraliser les données sur les TET. À partir du numéro d’assurance sociale — qui commence par un 9 pour les résidents temporaires — l’avocate propose de réunir dès l’arrivée des travailleurs les informations sur leur type de statut et la durée de validité de leur permis de travail. Le même fichier peut aussi permettre d’anticiper les éventuelles démarches de renouvellement de permis et de faire le suivi.
Dès l’arrivée des travailleurs, et même s’il est susceptible d’évoluer, indépendamment des réglementations en vigueur, elle suggère de les interroger sur « leur souhait à long terme au Canada », et de « préparer un chemin qui ne répond pas uniquement au besoin immédiat de l’employeur d’aller recruter de la main-d’œuvre ».
Si on a des opportunités pour faire cheminer la personne pour qu’elle reste le moins de temps avec un statut temporaire au Canada, allons-y pendant que les politiques le permettent !
Me Chouinard, Galileo Partners
Une question de conformité et d’équité
Autre incontournable pour l’employeur : assurer la conformité des conditions de travail du TET avec le programme duquel il dépend — d’autant plus lorsque les conditions exigées par ce programme sont modifiées. « Chaque travailleur peut avoir des conditions différentes », rappelle Audrey Anne Chouinard, enjoignant à « ne pas appliquer un copier-coller » en traitant les dossiers des TET.
Il est essentiel de se conformer aux obligations légales, même lorsque des conditions restrictives entrent en vigueur et qu’il devient tentant de se tourner vers « certaines pratiques malveillantes […] pour essayer de contourner les mesures » — une situation que redoute actuellement de voir émerger l’avocate. Outre le risque juridique, elle souligne aussi le « risque pour la réputation de ne pas bien faire les choses ».
L’équité de traitement entre tous ses employés, indépendamment de leur statut, est également primordiale. Avec l’entrée en vigueur, le 8 novembre 2024, de la hausse du salaire horaire médian fixant la limite entre une Évaluation de l’impact sur le marché du travail (EIMT) à bas ou à haut salaire, et les autres mesures qui l’accompagnent, certaines entreprises envisagent de se tourner vers des augmentations salariales pour conserver leurs TET — sans proposer d’équivalent au reste de leur équipe. Une pente glissante à éviter à tout prix, selon Me Chouinard.
Une fois de plus, la planification est la clé pour ne pas risquer de prendre des décisions impulsives et inadaptées, aux conséquences qui pourraient aller à l’encontre des effets désirés.
Photo : Toa Heftiba